CARTIER - Lot 154
CARTIER
Petite Tank Rectangle. Vers 1926
Rare modèle de dame Tank en platine et or blanc 750‰. Cadran blanc, chiffres romains, aiguilles feuilles. Mouvement Cartier postérieur, cal 845 vers 1969. N°1927081 Freq 21600 alt/h. Bracelet platine « tissu laminé 5 rangs » Boucle déployante or rose N°1896.
On joint trois maillons supplémentaires.
Boitier deux corps, verre intérieur cristal. Couronne saphir cabochon. Fonctionne, bon état. Fond Numéroté 17774.
Poids brut : 43,5 g - Dim 14 x 19 mm hors anses. Poids des maillons 5 g.
A noter : Le mouvement original a été remplacé par un modèle plus récent vers 1969 dans les ateliers de la maison Cartier. Un modèle équivalent est représenté page 191 dans le livre
« Cartier la montre Tank » de Franco Cologni. La Tank, une balle perdue
Si la Première Guerre mondiale a bouleversé l’Europe, elle a aussi, de manière inattendue, nourri certains imaginaires créatifs. Dans ce contexte troublé, on pourrait se demander quels repères ont guidé les créateurs, notamment dans les arts appliqués de la joaillerie. C’est en pleine révolution industrielle, à l’heure où les machines redessinent les paysages urbains et mentaux, que l’esthétique mécanique entre dans le langage des artistes. De Gustave Eiffel à Fernand Léger, en passant par les rouages symboliques des « Temps modernes » de Chaplin, la fascination pour l’ingénierie moderne se fait universelle. Les formes industrielles — vis, pistons, engrenages — devinrent les codes d’une nouvelle esthétique dans un climat incertain.
Dans cet élan, la maison Cartier prend un virage inattendu. En 1917, Louis Cartier conçoit une montre inspirée par le profil du char Renault FT : La Tank, pour conjurer le sort et en détourner les esprits négatifs. Tel fut peut-être l'ambition de la marque à l’écrin rouge.
Icône plus souvent féminine que masculine, la Tank séduit les élégances du XXe siècle : Jackie Kennedy, Andy Warhol, Catherine Deneuve ou Yves Saint Laurent en feront un accessoire de distinction. L’une des anecdotes les plus célèbres, celle de l’acteur Rudolf Valentino, sex-symbol du cinéma muet, qui refusa de retirer sa Tank durant le tournage du « Fils du Cheik » (1926), introduisant un anachronisme que la postérité a retenu avec tendresse.
Sans complexe, la Cartier Tank naquit de l’écho d’une machine de guerre, n’étant pas en reste, fier de son audace, Cartier proposa peu après : la Tank à « Anses Obus »
Un siècle plus tard, la Tank demeure. Non plus comme une évocation de guerre, mais comme un manifeste de style qui perdure.
Une balle perdue dans le chaos, peut-être, mais qui a touché juste au cœur.